ATHENA-DEFENSE

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Rapport d'Hubert Védrine sur les conséquences du retour de la France dans l'OTAN

 

 

 

Synthèse du rapport sur l’OTAN ?  dont le titre un peu pompeux,

 

(RAPPORT POUR LE PRESIDENT DE LA REPUBLIQUE FRANCAISE SUR LES CONSEQUENCES DU RETOUR DE LA FRANCE DANS LE COMMANDEMENT INTEGRE DE L’OTAN, SUR L’AVENIR DE LA RELATION TRANSATLANTIQUE ET LES PERSPECTIVES DE L’EUROPE DE LA DEFENSE ), 

 

rédigé par Hubert Védrine qui est désormais à la diplomatie ce que Lang fût à la culture un incontournable, admet que finalement, .. « C’est une politique audacieuse et décomplexée d’influence accrue dans l’Alliance qui facilitera les efforts européens de la France. Le maintien d’un certain niveau de capacité est bien sûr indispensable à sa réussite. » Bref ne changeons rien.

 

J’ai donc eu la curiosité de le parcourir.. Quoi de neuf sur le front ?

 

Après un rappel salutaire, sur les origines de l’OTAN et son histoire, salutaire, mais pour qui ? Je ne peux croire à l’ignorance du Président sur le sujet, mais il faut bien respecter la forme, qu’en est-il du fond ?

 

Nous abordons l’essentiel, c'est-à-dire la « rupture » sarkozienne, notamment avec l’héritage « gaullo-mitterrandien », et plus encore chiraquien, en politique étrangère et de défense (même si Jacques Chirac a lui-même tenté de réintégrer le commandement intégré).

Celle de son discours intentionnel devant le Congrès des États-Unis, le 7 novembre 2007 : « Plus l’Europe de la défense sera aboutie, plus la France sera résolue à reprendre toute sa place dans l’OTAN. Je souhaite que la France, membre fondateur de notre Alliance et qui est déjà l’un de ses premiers contributeurs, prenne toute sa place dans l’effort de rénovation de ses instruments et de ses moyens d’action, et fasse évoluer dans ce contexte sa relation avec l’Alliance, en parallèle avec l’évolution et le renforcement de l’Europe de la défense ». Et les décisions qui se sont traduites dans les faits. C'est-à-dire, le retour de la France dans le commandement intégré qui est proclamé au Sommet de l’OTAN de Strasbourg/ Kehl, les 3 et 4 avril 2009.  Trois conditions furent posées  à la pleine participation de la France aux structures de l’OTAN, celles de  la liberté d’appréciation totale pour la contribution de la France à des opérations de l’OTAN ; le maintien de l’indépendance nucléaire (la France a d’ailleurs confirmé en 2009 à juste titre ses non-participation au NPG groupe des plans nucléaires, ce qu’il ne faut pas modifier) et le fait qu’aucune force française ne serait placée en permanence sous un commandement de l’OTAN en temps de paix.

 

- Le plus facile à analyser (selon le rapport) est celle de l’influence de la France dans l’OTAN.

 

Un fait : le général français Abrial,  premier officier général non américain nommé à ce poste, a occupé la fonction de SACT de 2009 à 2012, date à laquelle il a été remplacé par le général Palomeros.  Cent trente militaires français y seront affectés à terme. L’attribution de ce commandement a permis que la France participe aux réflexions prospectives sur l’Alliance, et à la définition du nouveau concept stratégique de 2010.

Le SACT : Supreme Allied Commander Transformation) est un commandement chargé de l’élaboration des concepts et des doctrines de l’Alliance, de l’entraînement des forces et de la préparation des capacités militaires. A ce titre, il est responsable de la promotion et de la mise en œuvre de la Smart Defence.. C’est avec l’Allied Command Operations, tenu par un Américain, situé au SHAPE, à Mons (Belgique), un poste d’importance stratégique.

 

Le nombre de militaires français dans l’OTAN est passé au total de 242 à une « cible » de 925.

 

Ainsi toujours selon le rapport : « La France a influé dans deux domaines, celui de la réforme de l’OTAN et sur ce plan,  la France a  joué un rôle moteur depuis 2009 pour hiérarchiser les priorités, refondre les procédures, ramener le nombre des agences de 14 à 3 (en en espérant une économie de 20%), réduire la structure de commandement (réduction des personnels de -35% en 2013) diminuer de 11 à 7 les états-majors et donc faire faire des économies, et préparer un déménagement vers le nouveau siège en 2016. »

Celui de  la stratégie : la France a obtenu « (malgré les demandes de l’Allemagne et grâce à un arbitrage américain) qu’il soit réaffirmé que la stratégie de l’Alliance reste fondée sur la dissuasion nucléaire. La France a aussi accepté que l’OTAN décide de se doter d’une capacité de défense des territoires et des populations contre les missiles balistiques, sur la base d’une extension du programme de défense de théâtre (ALTBMD : Active Layered Theatre Ballistic Missile Defence).

 

«Nous apprenons au passage : que « La France prévoit de se doter d'une capacité de détection et d'alerte avancée interopérable avec les moyens de ses Alliés. Ce système national d’alerte avancée (radar et satellite) vise à surveiller les missiles balistiques, à déterminer l’origine des tirs et à favoriser l’alerte aux populations »

 que : Le Président Hollande a rappelé au Sommet de l’OTAN à Chicago les principes auxquels la France reste attachée en matière de défense antimissile balistique: le caractère complémentaire, et non substituable, de la défense antimissile à la dissuasion nucléaire ; l’adaptation du système à la menace ; le contrôle politique par les Alliés ; la maîtrise des coûts ; la nécessité de préserver la BITDE (base industrielle et technologique de défense européenne) ; et enfin la coopération avec la Russie.

 Fermez le ban.

Le rapport pose aussi de bonnes questions : -«  Jusqu’à quel stade de développement la défense antimissile restera-t-elle complémentaire de la dissuasion ». Le danger étant celui de la négation même d’un concept de dissuasion national indépendant. En gros et pour faire simple : Si le parapluie est efficace à quoi sert d’avoir une capacité de riposte puisque nous excluons de l’utiliser en premier.  

Quelle sera la part réservée à l’industrie européenne dans la fabrication des éléments de ce début de système défensif ? Bonne question, puisque seul le budget de la défense américain continue son maintien voire son augmentation et que les budgets européens plongent. Les Américains risquent de nous donner ce qui nous revient, c'est-à-dire pas grand-chose en proportion de notre effort de défense.. 

Est-ce que: « la défense antimissile de l’OTAN n’est pas dirigée contre la Russie ne portera-t-elle pas atteinte aux capacités de dissuasion stratégique russes » est-elle crédible ? Elle n’est pas convaincante, en tout cas aux yeux des Russes, qui considèrent sincèrement ou pas ou pour prendre un gage, que l’aboutissement de ce programme (les phases 3 et 4 de l’EPAA) correspondrait à une rupture des équilibres stratégiques.

Et oui aux yeux de l’OTAN, la Russie est-elle un partenaire ou  un adversaire potentiel ?  Le souci des russes c’est la Chine ? Tout ce qui menace leur propre capacité de riposte et leur indépendance nucléaire menace-t-elle leur propre indépendance ?

 

Enfin : « En Afghanistan, la France n’a pas influencé la stratégie de l’OTAN (en fait, des États-Unis). Mais elle a pu fixer son propre calendrier de retrait de son contingent (d’abord Nicolas Sarkozy, puis François Hollande) ». La vérité est qu’avec 4000 hommes engagés au mieux, 8000 pour les Britanniques, nous étions à notre place celle de simple apport supplétif.

 

En conclusion de cette partie d'évaluation, H. Védrine constate logiquement qu'une "(re)sortie du commandement militaire intégré n'est pas une solution", puisqu'"une situation nouvelle a été créée".

 

Je passe sur les CONSEQUENCES ECONOMIQUES ET BUDGETAIRES : de 325,86 M d’euros en 2011 alors qu’elle n’aurait été que de 264,86 M d’euros sans la décision de réintégration en 2009.

Notre retour dans l’OTAN a un coût somme tout limité, mais les sociétés françaises ont pu participer à certains projets OTANIEN. L’analyse sur la période 2000 - 2009 montre que la France a participé, sur la base de sa quote-part autour de 11%, à environ 60% des projets, pour un montant financier de 4,2 M d’euros. C’est bien mais peut faire mieux. Les programmes les plus importants pour l’industrie française sont le système de commandement et de contrôle aérien (ACCS – Air Command and Control System) et la défense antimissile de théâtre (couche basse) pour un montant global de 1,6 Md€. Cette capacité est développée par la société TRS (THALES Raytheon System – joint-venture détenu à hauteur de 50% par chacune des deux sociétés française et américaine). Depuis notre retour dans le commandement intégré (période 2010 – 2012), 14 « paquets de capacité » ou additifs, ont été approuvés pour un montant global de 0,7 Md€.

 

Ce retour a-t-il relancé l’Europe de la défense ?

Le rapport ne se prononce pas est cela se comprend, vous avez dit Europe de défense ?

 

La conclusion est donc à la lecture plutôt positive ? Mais pas du tout, mitigée : Je cite « Il est vrai qu’un processus de rapprochement pragmatique avait en effet été entamé depuis longtemps, mais sans remettre en cause ce qui était devenu un symbole politique. Le président Sarkozy semble avoir pris sa décision pour des raisons empiriques, continûment mises en avant par l’institution militaire, mais aussi idéologiques, découlant de sa conception de la « famille occidentale ».  Au bout de trois ans, les effets sont incertains : Une présence accrue ; une influence réelle ou faible, variable selon les sujets ; un surcoût, plus faible que prévu ; des opportunités économiques ou industrielles, liées ou non à ce retour. »

La seconde partie, m’est apparue moins intéressante : Mais vous pouvez la lire  sur

Rapport_VEDRINE.pdf (340.98 Ko).

 

En conclusion: “Souhaitée par l’institution militaire, approuvée par la majorité d’alors, cette décision a été critiquée par l’opposition de l’époque (Gauche et Verts), ainsi que par certaines personnalités de la majorité UMP, sceptiques sur les bienfaits à attendre de ce retour »

Mais le pragmatisme veut donc que puisqu’on y est, on y reste.. Fallait-il un rapport ?  Certainement pour faire passer la pilule aux alliés du parti socialiste et pour clore l’ère Sarkozy..  Dont acte.

 

Mais ce qui importe, c’est le ton donné dans ce rapport et qu’il faut reconnaitre, sans langue de bois.. H. Védrine souligne que : les Américains "espèrent vivement que la France ne va pas réduire davantage ses capacités". S'agissant de l'Europe de la défense, le ton est donné :  "le bilan est finalement très décevant". Et "Aucun pays d'Europe n'a rejoint l'ambition et la conception françaises d'une Europe de la défense".

 

Ces éléments de réflexion étant affirmés, les principales  recommandations sont les suivantes :

 

La France doit donc s'affirmer beaucoup plus dans l'Alliance

l'Alliance est formée autour de la première puissance militaire du monde.

C'est une alliance militaire, fondée sur le nucléaire..

Il faut enfin conserver une vigilance en matière industrielle et technologique, la smart defense pouvant provoquer un effet d'éviction sur des dépenses déjà fort contraintes.

 

Cela étant dit, je pense que si la France veut avoir un rôle et agir, pour faire en sorte que l’alliance puisse tenir compte de ses avis et de sa conception, il est nécessaire de na pas baisser sa garde et de s’affaiblir, or nous n’en prenons pas le chemin, c’est le moins que nous puissions dire.. Pourquoi les américains, et ils ont bien raison, tiendrait compte de notre propension à nous mêler des affaires du monde sans nous ’en donner un minimum de moyens.. Quant à l'Europe de défense, c'est un leurre..  

 



18/11/2012
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