Budget des Armées 2018, - cochon qui s’en dédit ! – Monsieur Macron.
Budget des armées 2018, - cochon qui s’en dédit ! – Monsieur Macron.
Ainsi, selon le ministère des Armées, l’exercice budgétaire de 2018 augmente les crédits des armées de 1,8 milliard d’euros (portés à 34,2 milliards), pour atteindre 41 milliards, si la hausse de 1,7 milliard par an se poursuit jusqu’en 2022. Les Armées, on ne le dira jamais assez, resteront, et de loin, les premiers investisseurs de l’Etat avec 18,5 milliards d’euros d’équipements prévus.
La future loi de programmation traduira donc, (ou pas), cet effort, à moins que Bercy ne vienne le contrarier avec ses annulations de crédit et ses reports, au risque de rejouer la séquence habituelle de la rustine sur le pneu crevé ou du pansement sur la jambe de bois.
Outre le fait qu’il a fallu encaisser l’annulation surprise de 850 millions d’euros de crédits décidée en juillet 2017, qui fut la cause, en partie, de la démission du général de Villiers, humilié en public par le Président Macron, Chef des Armées, il manque 1 milliard d’euros pour finir l’année 2017, en raison des gels budgétaires et de la prise en charge des opérations extérieures, ce qui a eu pour conséquence de différer des paiements et de reporter des acquisitions. (1)
Cette épée de Damoclès constamment brandie sur les budgets successifs qui renvoient dos à dos la droite comme la gauche, depuis plus de 20 ans, sont un mal qui perdurera, tant que les budgets votés ne seront pas garantis et sanctuarisés ou simplement sincères.
Car l’expérience vécue rappelle la dure réalité, tel Sisyphe condamné à faire rouler éternellement jusqu'en haut d'une colline un rocher qui en redescendait chaque fois, les Armées sont condamnées à voir leurs crédits amputés sans cesse, après avoir feint de croire à leur réalité.
Dans l’expression bien ancienne -cochon qui s’en dédit- le cochon est toujours le même, l’Etat.
Je crains donc que l’apparence ne soit une nouvelle fois le credo d’une réalité augmentée, la traduction d’une chimère, l’évidence des mensonges, des inexactitudes et des apparences. Bref, on n'y croit plus.
Fin 2016, le report de charge avait atteint 3,1 milliards d'euros. En 2017, les rapporteurs évoquent 3,4 milliards d'euros, ce qui représente environ 10% du budget de la défense prévu pour 2018! Or les besoins sont immenses, il serait inutile et fastidieux de les rappeler une nouvelle fois ici.
Et nouveauté, ô combien, injuste, (j’avais le choix entre horrible, ignoble, infect, nauséabonde, repoussante, répugnante, je suis resté sur du politiquement correct) sortie du chapeau des prestidigitateurs de Bercy, nourris au lait de l’immédiateté et des calculs de gribouilles, les Armées assumeront désormais le financement des surcoûts des interventions extérieures, non couvertes par la dotation initiale, qui étaient prises en charge, jusque-là, par un effort interministériel. Cela permettait, pour le moins, une répartition légitime de l’effort et d’engager la responsabilité de l’ensemble de l’Etat aux décisions qu’il était en droit de prendre ou pas. D’autant plus que la décision d’intervenir à l’étranger, de faire la guerre ou pas en quelque sorte, est prise par l’Elysée puis par la représentation nationale, mais certainement pas par les Armées, car dans ce cas nous changerions de régime et de légitimité.
Les Armées seront donc désormais comptables à l’avenir des interventions décidées par le pouvoir politique, ce qui revient à demander aux pompiers d’assumer les coûts et les conséquences des incendies allumés par les incendiaires, au médecin de financer la lutte contre la maladie de son patient, au juge de payer les frais d’entretien de son condamné. Bref, faisons la guerre à moindre prix, ce qui est commode si l’ennemi est faible, beaucoup moins si par malheur l’ennemi devait être plus fort que nous ne le sommes.
Il faudrait donc pousser la logique jusqu’au bout, donner au CEMA la capacité de refuser une intervention en fonction de la cagnotte qui lui est allouée... Bref, il n’échappe à personne, et pourtant c’est le cas, que cette confusion entre le donneur d’ordre et l’exécutant entre l’ordonnateur et le comptable est une véritable aberration... (Finalement j’ai le mot)
Nous voilà donc à l’aube du commencement des problèmes, et comme aurait dit un certain Charles de Gaulle, qui, devant la Jeep du général Leclerc baptisée « mort aux cons », aurait répondu « Vaste programme » ce qui sous une forme lapidaire et dans sa bouche résumait assez bien la situation.(2) Cette décision serait acceptable si le surcout devait être abondé non pas en se serrant la ceinture sur les autres programmes, et notamment celui de l’équipement. Je crains que cela ne le soit jamais.
Le ministère devra donc mettre en œuvre en 2018 l'annulation des 850 millions de crédits décidés cet été, ce qui représente le surcout en 2017 des interventions extérieures mais sans tenir compte des opérations intérieures et de celles faisant suites aux catastrophes naturelles, dont celle de l’ouragan Irma.
Devant les députés et les sénateurs, les chefs d’Etats-majors respectifs des trois Armées ont rappelé leurs besoins. Les Aviateurs demandent des avions et des ravitailleurs supplémentaires, les Marins des frégates et de navires logistiques, les Terriens une accélération du programme Scorpion, les urgences dans le nucléaire comme dans le classique sont archi-connues, identifiées, les menaces les sont tout autant...
La représentation nationale sait, il sera de plus en plus difficile aux politiques de nous mentir, car nous sommes face à une situation internationale d’une instabilité grandissante sans pareille depuis la fin de la guerre froide. Charles de Gaulle aimait à dire que l’histoire de France est étroitement liée à celle de son armée : « du jour où fut réalisée la conjonction d’un pouvoir fort et d’une armée solide, la France se trouva debout ». Le président Emmanuel Macron devrait s’en souvenir, lui, qui sans jamais citer de Gaulle, tente de suivre une voie plutôt de responsabilité, alors « cochon qui s’en dédit ? »
Nous verrons, mais les citoyens que nous sommes sauront s’en souvenir le moment venu, le temps passe si vite.
Roland Pietrini
(1) Il prévoit de réaliser une économie de 430 millions d'euros sur les versements à deux agences de défense dont Loccar. Quelque 90 millions d'euros seront également économisés en renégociant «certaines parties de contrats passés» dont le standard F4 du Rafale, le programme de frégates intermédiaires FTI et la tranche conditionnelle de la rénovation des Mirage 2000D. Enfin, un certain nombre de livraisons sont décalées, représentant une facture de 330 millions d'euros. Parmi elles, des radars destinés aux avions légers de reconnaissance, l'acquisition d'une charge utile pour les drones, un pod de détection missile pour Rafale.
(2) la vérité historique est en fait la suivante: Mort aux cons est le nom d'une Jeep de la 2e division blindée du général Leclerc. Durant la Seconde Guerre mondiale, le capitaine Raymond Dronne des Forces françaises libres (9e compagnie de combat, La Nueve) du régiment de marche du Tchad puis 2e division blindée, baptise sa Jeep « mort aux cons »[1]. Elle fut la première à entrer dans Paris, le , lors de la bataille pour la libération de la capi
il faudra s'en souvenir!
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