Loi de programmation : la réalité en face.
SNA
Le jeudi 7 juin, l’Assemblée nationale a adopté la loi de programmation militaire 2014-2030, celle-ci devra encore être débattue au Sénat, puis revenir à l’Assemblée nationale en commission paritaire pour une promulgation aux alentours du 14 juillet.
Quelques amendements à la marge ont été adoptés, dont la suppression de la mention d’une France « pourvoyeuse de souveraineté » en précisant la notion de « puissance d’équilibres ».
Cette mention avait d’ailleurs attiré mon attention lors de mon précédent article « une loi de procrastination ». Par ailleurs, l’accent a été mis sur la réserve opérationnelle et
l’intensification de son emploi.
Mais pour l’essentiel, les objectifs d’équipements n’ont pas été revus à la hausse et la
structure de la loi reste la même. L’effort financier principal étant renvoyé à 2027, la cible des 2% du PIB ne sera atteinte qu’entre 2024 et 2027, en reportant après 2030 les cibles d’équipement de la loi de programmation précédente 2014 – 2025, qui n’ira donc pas à son terme.
Un constat en forme d’aveu.
Le général Thierry Burkhard, chef d’état-major des armées, devant la représentation
nationale, avait précisé le 5 avril les raisons d’un report dans l’effort d’équipement de plus de 1266 blindés (Griffon, Jaguar, Serval et Leclerc modernisés), après 2030. Le ministre
Sébastien Lecornu devant cette même représentation et celle du Sénat s’en était expliqué la veille :
« Accélérer les achats supposerait de rogner sur d’autres postes de défense tout aussi
importants pour l’architecture globale, comme la maintenance, la formation ou les
investissements sur les infrastructures. Sans compter tous les autres chapitres sur lesquels le gouvernement entend rattraper le retard du pays. Des nouvelles menaces et des sauts technologiques à opérer ont été évoqués. « Je pense que ce serait dangereux de négliger le spatial, le cyber, le renseignement ou la défense sol-air. C’est un premier cas pratique que nous assumons », a indiqué Sébastien Lecornu. À travers ces choix, cette LPM s’emboîte dans la précédente, « mais commence à pivoter ».
L’aveu est d’importance, il a le mérite de traduire la réalité d’une situation plus que dégradée.
Nous ne sommes pas préparés à une guerre de haute intensité. Les parcs de matériels, et cela est valable pour toutes les Armées, ne pourraient être utilisés qu’à minima, faute de soutien, de munitions, d’entrainement.
La conséquence est cruelle, elle s’inscrit dans une forme de reconnaissance de notre
déclassement. À l’exception de notre force de dissuasion, nos forces classiques modelées par 40 ans de guerres asymétriques, de diminution à coup de hache et de budgets insincères ont été amputées de toute forme de cohérence.
Face aux réalités révélées par la guerre en Ukraine, nos forces classiques manquent à peu près de tout, ou bien ne possèdent plus que quelques moyens d’appui embryonnaires. La logistique
est sous-dimensionnée pour des matériels en fin de vie. Un seul exemple : un Griffon
consomme deux fois plus de carburant qu’un VAB, un Jaguar deux fois et demie plus qu’un AMX10RC… Etc..
Le mot est lâché : cohérence
Roland Pietrini
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