ATHENA-DEFENSE

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Europe – Ukraine – Russie : l’Europe doit choisir son chemin

 

 

 

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Un article paru sur la Voie de L'Epée, en février 2015.  Je l'assume! 

 

La récente initiative franco-allemande sur la crise ukrainienne, avec la visite de Merkel et de Hollande à Kiev suivie, et c’est un fait nouveau, d’une rencontre avec Poutine à Moscou, marque un tournant dans l’appréciation de la crise ukrainienne. Nous comprenons enfin, qu’il est exclu de résoudre la crise ukrainienne uniquement par le biais de sanctions envers la Russie. En affaiblissant l’économie russe, tout en surajoutant une crise supplémentaire à celle de l’Europe,  qui n’en a pas besoin, nous détournerions la Russie vers l’Asie ce qui aurait pour conséquence de nous affaiblir inévitablement à moyen terme.

 

De manière générale, la diplomatie passe nécessairement par un dialogue avec toutes les parties et ce dialogue ne saurait se faire dans le cas de la crise ukrainienne, (comme au Moyen-Orient)  sans  la Russie. Signe nouveau enfin, l’Europe par le biais du couple franco-allemand semble timidement  se désolidariser de la position américaine. Il est réaffirmé d’ailleurs,  en filigrane des propos du président Hollande lors de sa dernière  conférence de presse du 4 février 2015,  que l’Ukraine n’a pas vocation à entrer dans l’OTAN, que celle-ci ne saurait faire partie en l’état de l’Europe, et que donner des armes à L’Ukraine serait une erreur stratégique.

 

J’ai  donc choisi mon camp, j’imagine déjà les réactions outrées de quelques lecteurs, ils ne manqueront pas d’arguments pour m’accuser d’être passé à l’ennemi, sauf qu’ils devraient réfléchir à deux fois avant de désigner auprès de quel ennemi j’ai rejoint les rangs.

 

Dans cette « guerre » entre la Russie et l’Ukraine, puisque  j’ai choisi mon camp, il faut que je me justifie.

 

Je ne fais pas partie de cette étrange coalition qui fait de Vladimir Poutine un nouveau héros. On y trouve à la fois des amis dans la droite extrême et d’autres venant de l’extrême gauche.

 

Cela n’est pas suffisant, pour autant, pour fermer mon esprit, cela, bien au contraire, me contraint à réfléchir en toute modestie.

 

Je  reconnais à Monsieur Poutine une qualité, celle d’avoir redonné à son pays ce qui nous manque tant chez nous, l’indépendance et l’honneur d’appartenir à une nation indépendante et forte et cela est loin d’être parfait.  La Russie (Fédération de Russie) a changé, est-elle plus ou moins rassurante que l’ex URSS ? La question se pose.  Elle se pose pour nous, pas pour le peuple russe. Certes, elle n’a pas conservé de l’URSS le meilleur, la corruption est présente, mais, objectivement, elle n’est pas la création de Poutine,  les droits de l’homme sont bafoués, ne l’étaient-ils pas  déjà auparavant ? Rien de nouveau ! Mais où  en serions-nous, nous, les donneurs de leçons si nous étions issus d’une histoire comparable ? Nous, qui sommes incapables de régler nos problèmes, celui de nos fractures, celle de nos contradictions et de notre incapacité au consensus malgré quelques sursauts. Celle de notre impossibilité aussi à renouveler notre classe politique et celle de notre incapacité à réduire cette  oligarchie prégnante conséquence de nos incorrigibles faiblesses toutes parfaitement identifiées mais jamais corrigées tant l’hypocrisie est de règle.

 

Oui, Poutine peut fasciner une partie de l’opinion française et européenne car Poutine est un chef, cela dérange, cela fait mal et  cela nous  renvoie à nos contradictions et à nos lâchetés.

 

Il a eu raison contre tous et avec nous contre la guerre en Irak, sans nous en ne condamnant pas la Syrie au nom de la lutte contre le terrorisme islamiste, sans nous, en s’abstenant au conseil de sécurité lors du vote pour l’intervention en Libye. Depuis le conflit du Kosovo, en 1999, la Russie s’est opposée systématiquement à l’interventionnisme. Dans le cas de la Libye, la Russie avait conscience que cela pouvait déboucher sur un conflit de plus grande ampleur dont les conséquences sont lourdes. Nous en constatons aujourd’hui les dégâts. Nous avons nié par le mépris l’expérience de la Russie acquise en Afghanistan, où nous n’avons pas fait mieux, et critiqué son action en Tchétchénie, compte tenu de la violence de la répression.  Aurions-nous fait mieux dans les mêmes conditions ?

 

Après le 11 septembre, la Russie a tenté de  se rapprocher de l’Europe et  a reposé en de nouveaux termes la question de ses frontières orientales. Celles des Pays Baltes, de  la Biélorussie, de  l’Ukraine et  de la Moldavie. Le basculement de l’Ukraine de Kiev dans un semblant de démocratie  suite à un coup d’état, a précipité les choses. La corruption est pire qu’auparavant, l’économie est un désastre, des milices d’influence nazi et ce n’est pas de la désinformation s’y déploient  et c’est parce que nous avons fermé la porte  au dialogue et au juste équilibre en emboîtant le pas des Etats-Unis que nous sommes aujourd’hui en partie responsables de la situation en Ukraine. Oui, la Crimée est indexée à l’encontre de toute loi internationale, le Donbass risque de l’être tout autant. On ne peut nier la volonté d’une partie de la population russophone du Donbass à se rapprocher de la Russie, après qu’elle ait mesuré le faux espoir donné par le pouvoir central de Kiev. Et d’ailleurs les bombes et les obus d’artillerie n’ont pas de couleurs différentes lorsqu’ils tuent les populations. Peu importe leur provenance. Ni l’armée ukrainienne ni les milices pro-russes ne font la guerre en dentelle.

 

Au-delà et pire encore, le problème de la Serbie n’est pas encore réglé et personne n'en parle : En 2013, Poutine déclarait en parlant de la Serbie : « Nos relations ont un caractère non seulement amical et stratégique, mais aussi complètement particulier, qui s’est formé au cours des siècles grâce à nos peuples », la même année un sondage réalisé en Serbie montrait que les Serbes étaient plus favorables à une union avec la Russie qu'avec l'Union européenne Il faut se souvenir qu’après la chute de Milošević, la Serbie du président Zoran Đinđic s'est tournée vers les États-Unis et l'Union européenne. En 2003, Jovica Stanišić, chef de la Sûreté d’État de Serbie (DB), avait fourni aux forces américaines les plans du réseau de bunkers de Bagdad, construit et mis en place au cours des années 1970 par la Yougoslavie de Tito. Cela a été le point de départ d'une ère nouvelle des relations américano-serbes et cause d’une humiliation supplémentaire pour les Russes.

 

Les Etats-Unis qui  souhaitent étendre leur influence en Europe de l’Est par le biais de l’Otan, contraignent ses membres à les suivre dans leur course à l’hégémonie mondiale. Nous en récoltons aujourd’hui les fruits en Europe. Cette politique hasardeuse à laquelle nous avons adhérée en bradant notre indépendance (en Roumanie l’aéroport de Constantza est désormais une zone militaire américaine), non remise en cause par les socialistes, nous la devons  en France au président Sarkozy, qui se voyait grand à l’égal d’un Obama et qui ne fut que valet.  Cette politique est-elle sur le point de changer ?

La reconstruction de l’armée russe est désormais en cours et cette reconstruction patiente après la  quasi disparition de l’armée rouge ne saurait s’arrêter.

 

La Fédération de Russie reconstruit  depuis 5 ans  une armée blindée et mécanisée dont l’allègement est tout relatif. Elle  reste à mon sens  quasiment calquée sur le modèle précédent de l’URSS, en faisant un effort sur la marine et la défense aérienne, elle s’appuie sur un stock d’armement considérable dont une partie provient des stocks de l’armée rouge. 

 

Sans entrer dans le détail complexe de la réorganisation,  « la réforme Serdioukov » est fortement remise en question aujourd’hui mais un certain flou demeure et le concept de « dissuasion classique » qui consiste à privilégier la masse est une constante pérenne de l’art militaire russe.

 

Cette capacité, au nom d’une conception dissuasive basée sur le nucléaire, nous  ne la possédons pas, nous l’Europe et peut-être les Etats-Unis  ne peuvent même plus en donner l’illusion.

 

Pourtant, qui songerait aujourd’hui  à envoyer des bombardiers nucléaires stratégiques, dont seule la France a conservé cette capacité en Europe, pour l’Ukraine et le ferions-nous le cas échéant pour la Pologne ? Cette capacité de résistance classique nous l’avons bradée, les budgets de la défense continuent à baisser en Europe, Pologne exclue, alors que partout ailleurs ils explosent, nous faisons la même erreur que dans les années 30,  nous ne pouvons même plus donner le  début du commencement d’une illusion. Nous sommes désormais des chiens nus. Et d’ailleurs il est symptomatique de constater, que plus les budgets de la défense diminuent sous prétexte d’économies plus la crise économique sévie et plus le chômage est exponentiel. Il faudra que les économistes nous l’expliquent. 

 

Pour mémoire et pour l’anecdote,  la France ne pourrait déployer au mieux  qu’un bataillon de 40 chars Leclerc dans l’hypothèse où nous devrions renforcer notre présence en Pologne.  

 

Le retour à un affrontement est-ouest est, avec la déstabilisation du monde musulman, un danger majeur. J’ai choisi mon camp, celui de la France et celui d’une Europe enfin responsable.  Celui d’un retour à une politique d’indépendance confiante, orientée vers  des valeurs simples: rigueur, autorité, confiance, souci d’équité et de responsabilité,  en rompant  résolument avec des structures administratives  et contre productives qui éloignent les peuples européens de la grande idée européenne lancée au tout début par de Gaulle et Adenauer – une manière de prendre son indépendance vis-à-vis des Etats-Unis dont  les intérêts en Europe et dans le monde ne sont pas  tout à fait les nôtres.

Le chien a beau avoir quatre pattes il ne peut emprunter deux chemins à la fois  (proverbe africain). L’Europe doit choisir son chemin.

(Article inspiré du précédent article Russie – Europe, complété et réactualisé)

https://www.athena-vostok.com/russie-europe-j-ai-choisi-mon-camp

 

Roland Pietrini

Athena-Defense

https://www.athena-vostok.com/

Publié par Michel Goya à 2/06/2015  

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03/04/2022
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