Loi de programmation 2014-2030, de certitudes en interrogations.
Avec 413 millions sur 7 ans annoncés lors de ses vœux aux armées, le président de la République a donné sans entrer dans les détails les principales orientations de la future loi de programmation militaire (LPM) 2024-2030, afin de « transformer » les Armées. Sans apparemment toucher au format, celui-ci a annoncé quatre pivots.
- Le renforcement de notre dissuasion
- La préparation à la haute intensité
- La protection de nos intérêts dans les espaces communs
- Le renforcement des partenariats internationaux
En première analyse, ces quatre priorités ne bouleversent pas fondamentalement notre défense.
On peut cependant, à la suite de l’audition du ministre des Armées devant les parlementaires, donner quelques informations qui restent à confirmer.
Le passage au tout Rafale ne concerne que la suppression dans les escadrons de défense aérienne des Mirage 2000 C et 2000 -5, ce qui impliquerait la commande de 40 Rafale supplémentaires, faisant ainsi passer le nombre de Rafale de 161 à 200 en 2030 ?
Les 50 mirage D feront toujours partie de l’équipement de nos armées au moins jusqu’en 2030. Nous en avions 67. Cf les différents tableaux.
Le format de notre AAE ne semble pas être envisagé à la hausse, or cela fait partie des besoins exprimés par le Chef d’Etat-Major de l’AAE.
La défense sol-air sera probablement renforcée lors du remplacement des Crotale par des systèmes MICA VL NG, des commandes supplémentaires de Mamba ne sont pas exclues. Signe encourageant, la commande de 700 missiles ASTER 30 pour les systèmes Mamba NG pour à la fois la défense sol-air française et italienne (un système sera cédé à l'Ukraine, quid de son remplacement).
Pour la Marine, Le PANG est confirmé. Il sera équipé de Rafale, du SCAF et de drones. lLe renforcement de l’armement de nos frégates est envisagé, mieux armées cela veut dire le doublement du système de lancement vertical de 16 cellules Sylver A50, qui passerait à 32, pour les FREMM et FTI mais la cible resterait la même. 15 frégates de premier rang.
Cela pourrait être compensé par des commandes de destroyers, en réalité, des corvettes qui devraient afficher un déplacement de 3 000 tonnes maximum pour une longueur de 110 mètres. Au moins trois configurations seraient prévues : une première pour la lutte antinavire, une seconde pour les missions longues, avec une capacité antisurface et une troisième pour la patrouille de haute-mer. Un certain nombre pourrait être positionné outre-mer.
Le nombre de SNA n’a pas été évoqué non plus à la hausse.
Pour l’Armée de terre, il est possible que le programme Scorpion puisse être réajusté afin de dégager des moyens financiers pour le rétrofit des Leclerc avec système de protection active (Hard kill)? L’acquisition de systèmes sol-air basse-couche, l’achat de M 142 Himars et l’acquisition de munitions rodeuses paraissent acquis. Mais notre corps de bataille reste sous-dimensionné, certainement pas à la hauteur d’une Nation comme la France, membre du conseil de sécurité qui veut être nation- cadre en Europe, laissant ainsi une capacité de leadership à la Pologne et à l’Allemagne qui ne cachent plus leur volonté de s'affirmer comme leader en Europe et principaux alliés des Etats-Unis.
L'Europe chère à monsieur Macron de la défense étant définitivement l'OTAN.
Le sujet de la coopération européenne alors que de plus en plus de nations d’Europe achètent sur étagère des systèmes américains et coréens est devenu essentiellement politique. Cela est vrai pour le Char futur et pour le SCAF qui ne sont maintenus que par principe et idéologie.
Le renforcement de la dissuasion passera notamment par le renforcement des postures permanentes. « Cela suppose des capacités accrues de renseignements qui nous permettent d'anticiper les crises ou les menaces », indique le chef de l’Etat qui annonce l’augmentation massive « des crédits de renseignement de près de 60 % au total, avec, entre autres, le doublement du budget de la DRM et de la DRSD ».
Afin d’assurer notre capacité de résilience et plus particulièrement dans le domaine du cyber, Monsieur Macron entend « doubler notre capacité de traitement des attaques cyber majeures ». Pour atteindre une résilience plus générale du pays, il souhaite également doubler à terme « la réserve opérationnelle (ndlr : soit 100 000 personnes environ), qui permettra de renforcer notre armée d'active et la montée en puissance d'unités nouvelles de réservistes »
Cette réserve opérationnelle, comment sera-t-elle recrutée, encadrée, entrainée armée, et avec quelles missions?
Cela pose aussi une question fondamentale, avec seulement 205000 militaires d’active, comment faire plus ? Comment et avec quel budget et surtout avec quel statut, les réservistes pallieront la faiblesse en effectif des professionnels d’active ?
En 2027, une autre majorité et un autre président sortira des urnes, continuera -t-il cet effort ? L’avenir du conflit en Ukraine qu'on le veuille ou non, ne dictera -t-il pas l'accélération ou l'abandon de certains des objectifs?
Il reste une certitude, l’économie de guerre promise par le président Macron est nécessaire, elle se heurte à la réalité d’une économie dépendante d’une dette de plus en plus abyssale et d’une inflation qui risque de confirmer l’adage que "le temps perdu ne se rattrape jamais".
Roland Pietrini
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