ATHENA-DEFENSE

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Syrie : Seul comme Sisyphe, Hollande, aura le choix de rouler son rocher en le remontant sans cesse du pied de la montagne. (réactualisé)



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L’intervention contre la Syrie reste  probable, sous une forme ou une autre,  en dépit des réserves de l’opinion publique américaine et française et des difficultés d’Obama devant son congrès à front renversé, puisque les démocrates y sont défavorables alors que les républicains, ce n’est pas une surprise, seraient pour l’intervention.  

 

Pour ce qui concerne la France, je regrette personnellement cette détermination d’apparence, qui traduit en fait  de la part d’un président faible sur le plan intérieur, une fermeté de timide timoré,  (pléonasme volontaire) dont la communication maladroite sur la forme de ses discours et sur le fond ne renforce pas la crédibilité de la France. A cet égard le manque de charisme de notre président totalement isolé, petit valet d’un Obama rayonnant, face à un Poutine jubilant,  lors du G20 me paraît  illustrer parfaitement  ce déficit de crédibilité.

 

On ne justifie plus une guerre sur des principes moraux aussi légitimes qu’ils puissent être, en évoquant l’idée de punir. Parce que dans ce cas, il faudrait brandir la foudre partout où ces principes sont bafoués.. Centrafrique (1), Birmanie, Corée du Nord, Tibet, Biélorussie, la liste en est si longue, que « notre va-t’en guerre » manquerait de souffle pour ses indignations. Le devoir d’ingérence a des limites n’en déplaise à Kouchner  qui est par ailleurs un homme profondément respectable. Elles ne sont justifiées qu’avec l’aval d’une résolution du conseil de sécurité, qu’il est commode de dénoncer lorsque ses décisions collectives ne vont pas dans notre sens.

 

Ces indignations  sont d’autant plus arbitraires,  que l’on connaît assez  mal les conséquences du « jour d’après ». Des questions pour le moins se posent, que fait-on, après les frappes ? La crise sera-t-elle réglée pour autant ? Est-ce que cela aide à installer des conditions de règlements du conflit ? Ne renforce-t-on pas les terroristes islamistes ?  Ne favorisons-nous pas la substitution d’un terrorisme par un autre ? Bref en jetant de l’huile sur le feu avons-nous conscience de renforcer l’incendie ? Sommes-nous les pompiers du monde ?  Ou bien en  sommes-nous les incendiaires extravagants ?

 

Il ne fait aucun doute (2) que cette attaque  chimique est de la responsabilité de l’armée syrienne. Il ne fait aucun doute que cette attaque est la conséquence d’un acte volontaire. Il est tout aussi probable que les conséquences sanitaires et létales ont dépassé leur objectif qui était celui de terroriser. Jouer un coup de trop aux échecs, cela ne pardonne pas.  Le BND (les services secrets allemands) auraient intercepté une conversation qui indique que l’attaque au sarin aurait été programmée mais non maîtrisée. Problème de dosage des obus, non maîtrise de l’aérologie, qui ont eu les conséquences que l’on sait. Le rapport déclassifié français ne fait référence d’ailleurs à aucune écoute, de qui se moque-t-on ?  

 

 Nous savons que le maniement de l’arme chimique et notamment en milieu urbain,  implique bien évidemment,  une capacité à dominer son sujet. Ceux qui ont suivi une formation NBC ne serait-ce que sommaire le comprendront aisément.  

Cette information forcément « déclassifiée » de la part du BND,  volontairement divulguée et reprise par le Monde démontre la réalité de l’attaque et l'absence de maîtrise des  conséquences.. Cela n’excuse pas  l’acte mais démontre que si l’intention de terroriser existe, elle n’est ni plus horrible, ni moins terrible que le bombardement systématique par l’aviation et l’artillerie de populations plus ou moins favorables à l’opposition. Cette population qui subit et meurt reste otage des deux parties et  ne saurait être de nouveau l’objet de « punition » de la part de pays occidentaux qui se veulent rédempteurs des péchés du monde,  il y a pour le moins une certaine légèreté dans le jugement.  Quant aux belligérants d’une guerre civile, je les renvoie dos à dos. Les exactions et les atteintes aux droits de l’homme le sont des deux cotés. Les suppliciés se valent tous.

 

 Ce  terme punir, employé par Monsieur Hollande  est donc plus qu’inadapté puisqu’en fin de compte c’est la population syrienne qui serait par notre intervention punie par deux fois.  Je ne crois pas un seul instant que frapper uniquement des objectifs militaires changent quoi que ce soit à la nature injuste de la pseudo punition. Les servants et les soldats syriens légitimes à   Assad ou pas,  subiront le sort de tous les soldats de toutes les guerres : ils crèveront sans réellement savoir pourquoi.

 

En conséquence, la réaction occidentale me parait parfaitement maladroite et inadaptée. Soit, il fallait frapper immédiatement   les unités ayant utilisés l’armes chimiques (et encore, il suffit de quelques obusiers et une dizaine d’obus chargés chimiquement pour provoquer des effets létaux irrémédiables sur une population concentrée et passive) soit  réagir, par raid surprise, selon la doctrine israélienne en jouant de l’effet de surprise, sur des postes de commandement puis cesser toute action. Ni la France, ni les EU, n’avaient de toute façon, ni la capacité de riposte immédiate, ni la volonté politique de la faire. Certains peuvent le déplorer, mais c’est un fait. Le pragmatisme consiste à en être conscient.  L’honnêteté à savoir le dire.  

 

Lorsque l’on  souhaite s’impliquer au sein d’un conflit intérieur de type guerre civile, dans lequel nos politiques ne comprennent pas grand-chose, ( en tout cas le discours est si confus que je me demande légitimement s’ils en ont une idée claire) Il est inopportun de réagir en fonction d’une morale à géométrie variable. La guerre est une vaste « saloperie ». La "résistance" est  loin de présenter toutes les garanties de respect de la morale et du respect des droits de l’homme, on commet le  risque en les aidant à recevoir en retour quelques désillusions, comme en Libye, comme en Egypte et comme en Tunisie. Les minorités chrétiennes notamment en paieront le prix. Parmi ces groupes djihadistes d'opposition au régime Syrien d'Assad, se trouvent le Front al-Nosra, qui a fait allégeance au chef d'al-Qaida, Ayman al-Zawahiri, et l'État islamique d'Irak et du Levant (EIIL), branche irakienne d'al-Qaida qui a pris de l'essor récemment en Syrie. "Une action militaire occidentale bénéficierait potentiellement à tout groupe armé en Syrie", déclare  M. Lister, analyste à l'IHS Jane's Terrorism and Insurgency Centre.

 

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Dos à dos

 

Les  frappes risquent donc de favoriser ces groupes disparates, sur  "un nombre incalculable de terrains d'opération, avec chacun sa propre dynamique" poursuit M. Lister. 

L’exemple de notre intervention au Mali avancé par quelques-uns uns est parfaitement irrecevable. Le contexte géopolitique  y est radicalement différent, en Syrie, l’adversaire n’est pas comparable à des terroristes ou des mercenaires, bandits perdus dans le désert au sens propre et figuré, équipés de Toyota, contraints par des  élongations logistiques considérables, dépendant des puits et de dépôts prépositionnés. L’adversaire syrien, lui, est dirigé par un chef intelligent, organisé et retors, qui peut compter sur l’appui de plus de 50% de sa population. Il est habile, il tient les grandes villes et peut compter sur  des alliés et non des moindres, tel que l’Iran et  Poutine qui profite de cette  crise pour montrer leurs muscles ? Sans la Russie, c’est un fait,  aucune solution ne peut être trouvée. Se passer de Poutine, c’est lui offrir un boulevard  dans lequel il s’engouffre avec délice..  Se passer de la Russie c’est méconnaître la soif de reconnaissance d’un pays qui veut désormais retrouver toute sa place sur le plan international.  

 

En conséquence, la maladresse des Etats-Unis et de la France réunis est d’autant plus à souligner que d’autres nations, hors la Russie, et notamment la  Chine et l’Iran en profitent pour se tailler une légitimité régionale et une influence dont ils sauront tirer profit.

 

Le président Obama  reste, au-delà des apparences, plus que réservé dans cette affaire, dans la mesure où il  est conscient que le bourbier syrien est susceptible de lui faire perdre pour la première fois son capital confiance auprès de ses électeurs.  Les démocrates risquent d’en payer le prix aux prochaines élections. Ainsi,  le Nobel de la paix s’est piégé lui-même en désignant d’avance une ligne rouge à ne pas dépasser, c’est à dire l’emploi des armes chimiques et finalement l’addition sera sévère, avec une déstabilisation non maîtrisée de la région.

 

 

 

Il n’y a pas si longtemps : La secrétaire d’Etat américaine Hillary Clinton avait affirmé  que le fait de livrer des armes à l’opposition syrienne qui lutte contre le régime du président Bachar al-Assad pourrait aider al-qaïda et le Hamas. En effet, des responsables de ces deux entités, qui figurent sur la liste noire américaine des organisations terroristes, ont exprimé leur soutien aux opposants du régime de Damas.  Mme Clinton avait déclaré dans un entretien à la chaîne CBS News. “Nous ne savons vraiment pas qui pourrait être armé”- “Soutenons-nous al-Qaida en Syrie?”-“Le Hamas soutient maintenant l’opposition. Soutenons-nous le Hamas en Syrie?”.  On le voit, la position américaine reflète une ambiguïté flagrante, tandis que  Hollande, désormais  trop engagé, commence à entamer une marche de crabe  pour reculer en faisant semblant d’avancer. Après le vote du congrès, il attendra les conclusions des experts de l’Onu, puis seul comme Sisyphe (3), il aura le choix de rouler son rocher en le remontant sans cesse du pied de la montagne..

 

 

 (1)  6/09/2013 : Des milliers de personnes ont été déplacées et au moins huit villages ont été incendiés au cours de récentes violences dans le nord de la Centrafrique, a indiqué vendredi le Haut-Commissariat de l'ONU pour les réfugiés (HCR).

Une équipe de l'agence onusienne s'est rendue la semaine dernière dans le nord du pays, à Paoua, une ville située à 500 km de la capitale Bangui. Elle a "trouvé sept villages incendiés et désertés, un huitième village à moitié incendié, et les villageois cachés dans la brousse", a expliqué une porte-parole du HCR, Melissa Fleming, au cours d'un point de presse.

L'équipe du HCR a dénoncé une généralisation des violations des droits de l'Homme.  Près de 209.000 est le nombre de nouveaux déplacés enregistrés depuis décembre, a indiqué Mme Fleming du HCR.

 

(2) ( le rapport déclassifié est par ailleurs un ersatz de rapport tant il est peu précis et d’un niveau de rédaction et de révélation disons un peu faible) - Si c’est le reflet du rapport classifié, il aurait mieux valu ne pas le rendre publique-  

 

(3) Pour avoir osé défier les dieux, Sisyphe fut condamné à faire rouler éternellement, jusqu'en haut d'une colline un rocher qui en redescendait chaque fois avant de parvenir au sommet.

 

 

 



07/09/2013
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