ATHENA-DEFENSE

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Création d’une brigade ALAT : retour vers le futur…

 

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 Opex: photo Ecpad

 

Le nouveau modèle de l’armée de terre avec 2 divisions dont  6 brigades,  (deux brigades blindées, deux brigades médianes et deux légères,  sans compter les brigades spécialisées)  sera donc  plus « simple et resserré » qualificatif employé par les communicants lorsqu’ils veulent dire que faute de moyens supplémentaires, il faudra faire mieux avec moins. C’est dans cette perspective que le CEMAT, le général Bosser ressuscite une brigade aéromobile.  Elle se nommera Com ALAT,  à moins qu’elle ne soit rebaptisée 4e brigade aéromobile (4e BAM). Cette  brigade, qui forte de 4 400 militaires et de 202 hélicoptères de combat et de manœuvres, fut dissoute en 2010, elle succédait à la défunte  4e Division Aéromobile, la « Hernu brigade ».

La création de cette brigade semble donc obéir à un juste besoin,  celui de la cohérence de  l’outil hélicoptère et celui de l’unicité de son commandement. La tendance bien française de créer des structures de commandement par subdivision d’arme reste donc prégnante, alors que l’on sait que pour l’essentiel la 3D « terrestre » servira détachée, délocalisée et par « mise à disposition »  au profit des troupes engagées au sol. La perspective d’un engagement au complet d’un régiment d’hélicoptères de combat et à fortiori d’une BAM ne peut se concevoir que dans le cadre d’un conflit de haute intensité ou dans le cadre d’une coalition, ce qui apparait fort heureusement peu probable, même si cela ne peut être exclu. Avec 3 RHC et dans cette hypothèse,  au mieux, nous ne pourrons engager que l’équivalent d’un seul. C’est d’ailleurs cette idée de mise à disposition qui avait placé l’ALAT sous l’autorité exclusive du Commandement des forces terrestres, à l’exception du 4°RHFC qui fait partie de la  Brigade des forces spéciales. On revient donc en arrière dans un flou qu’il conviendra de préciser.        

Souvenons-nous, c’est en 1983 que  la brigade aéromobile expérimentale fut créée  et, c’est en 1985 que naquit  la 4°  DAM. Cette division qui se voulait un outil de combat antichar était dimensionnée pour porter un coup d’arrêt face à une GMO de type soviétique. Ce concept porté par le ministre de l’époque Charles Hernu ne faisait pas l’unanimité. Son principal défaut  était sa légèreté, et opinion qui m’est toute personnelle, elle  répondait à une menace ENI sous-estimée tant en  ses moyens Latta,  (lutte anti-aérienne toutes armes) qu’en  ses moyens dédiés Manpads y compris ceux des BTR 70 et 80 et surtout du BMP2 avec la capacité AA de son canon de 30mm.   Les moyens AA spécifiques  du niveau bataillon au niveau divisionnaire en passant par le niveau régimentaire des  ZPU2,  ZSU23/4, SA 9, SA 13, SA 8 étaient aussi sous-estimés ou plus grave, simplement ignorés.  Ce concept a permis cependant de faire évoluer l’Alat tant sur le plan tactique que sur le plan de son adaptation au combat délocalisé plaçant celle-ci devant nombre d’autres aviations (terrestres) équivalentes, ce qui est la conséquence, et nous ne sommes pas à l’abri des paradoxes, de l’absence de blindage et de protection active et passive  de nos  hélicoptères en dotation. En réalité, ce manquement capacitaire aura fait progresser de manière spectaculaire le concept d’emploi français des hélicoptères de combat de telle manière que certaines armées s’en sont inspirées, sans jamais atteindre le niveau de maîtrise de nos pilotes.  Seul  l’arrivée du Tigre et du NH90 Caïman  permet aujourd’hui d’envisager une nouvelle phase d’évolution tactique, notamment avec le Tigre HAP.

 

4° Dam.png4° DAM en 1988

 

La 4° DAM  avec  ses  trois régiments d'hélicoptères de combat, son régiment d'infanterie aéromobile, ses deux unité de soutien,  dont un régiment d’hélicoptère de commandement et de manœuvre,  avait à sa disposition  160 hélicoptères légers, dont  90 hélicoptères d’attaque de type Gazelle SA 342M HOT dotés chacun de quatre missiles antichars « HOT » - version air/sol, 30 hélicoptères d’appui-protection de type Gazelle SA 341F2 Canon dotés chacun d'un canon de 20 mm de type GIAT M621 en sabord droit, 40 hélicoptères de reconnaissance et de liaison de type Gazelle SA 341F dite Gazelle lisse et 80 hélicoptères de manœuvre de type Puma SA 330B, mais aussi 198 véhicules légers tout-terrain dont 45 véhicules légers de type AUVERLAND A3 dotés d'un poste de tir antichars MILAN et pour le fun, 151 motocyclettes de 125 cm3.   

La 4° DAM pouvait théoriquement délivrer 360 missiles antichar HOT sans compter les 45 postes de tir de missiles antichar MILAN sur les AUVERLAND A3  des troupes au sol dont la mission principale était celle de canaliser les forces ennemis. 42 canons de 20 mm antiaériens de type 53T2 montés sur camionnettes tactiques assuraient la couverture anti-aérienne de proximité et 30 canons de 20 mm de type GIAT M621 sur hélicoptères d’appui-protection l’appui au sol et la lutte anti-hélicoptères.

Les trous capacitaires furent rapidement identifiés, ils le sont toujours en partie, absence d’hélicoptères de transport lourd, absence d’hélicoptères léger de renseignement,  manque d’allonge et de protection des Gazelle, insuffisance de puissance des turbines du Puma et des Gazelle par temps chauds,  défaut de protection active et passive, incapacité à combattre de nuit, capacité en partie comblée par l’arrivée de la Gazelle Viviane.

 

 

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Un trou capacitaire non comblé.

 

L’Alat dispose  aujourd’hui, en 2015,  de 320 appareils et de 15 avions Pilatus et TBM 700, mais devrait en posséder 273 en 2019, la cible étant de 140 appareils de reconnaissance et d’attaque, (60 Tigre et 80 Gazelle 115 hélicoptères de manœuvre  (68 HN90,  26 Couguar, 8 Caracal, 13 Puma)   et 18 Fennec en école (36 EC120 pour la formation en leasing). Il est prévu d’équiper 58 Gazelle Viviane et 23 SA-342M de NumALAT et de la minigun M134; elles  doivent rester en service jusqu'en 2030. Comme toute cible, il n’est pas exclu de la rater.   

Une Alat qui a subi  en 20 ans  une réduction de 60% de ses effectifs et moyens et qui espère posséder un jour des HIL (Hélicoptère inter-armée léger), mais qui reste la seule force européenne d’importance à ne pas posséder un vrai hélicoptère de transport lourd. Lors de la première guerre du golfe, ce trou capacitaire avait d’ailleurs été identifié. Ce  sont les américains avec leurs Chinook  qui ont transporté les antennes chirurgicales mobiles qui, faute de moyens français de transport,  seraient restées…  immobiles. A titre de comparaison,  la Royal Air Force dispose de 60 hélicoptères CH-47 Chinook qu’elle met en œuvre depuis la base d’Odiham, dans le sud de l’Angleterre.

Lors du récent conseil de défense restreint du 20 mai,  il aurait été évoqué la possibilité d’une  commande de 7 Tigre supplémentaires et celle de l’accélération des cadences de livraison des NH 90TTH ou d’une commande supplémentaire. Ce  sont, si cela était confirmé,  des signes encourageants, mais compte tenu de l’expérience nous serions tentés de nous demander si cette commande supplémentaire (ou avancée, la cible restant la même ?) ne se fera pas au détriment d’autres programmes. Il va donc falloir attendre les annonces de la nouvelle révision de la loi de programmation en juin afin d’en constater les effets, en souhaitant que ceux-ci soient plus judicieux que le « simple et resserré ».

Il conviendrait de ne pas oublier les autres armées, dont la Marine, et ce n’est qu’un exemple, qui recevra 8 FREMM au lieu de 17, difficile de faire plus resserré, même si la cible semble être de 15 frégates de 1° rang. Quid des Bâtiments de soutien ? Quant à l’Armée de l’air, si elle sauve ses ravitailleurs, (ses C135F ont plus de 50 ans d’âge, 3 peuvent voler sur 14), quid du rythme de livraison des Rafale compte tenu des ventes « sur étagère » à l’export ?

 

L’Alat est devenue au cours de son histoire une arme à part entière, mais nous ne formons plus aujourd’hui que 20 pilotes par an, nous en formions 50, il n’y pas si longtemps. Elle est l’arme de l’excellence, du renseignement et de la décision. Sans hélicoptères en nombre suffisant nous nous priverions d’un outil indispensable compte tenu de la diminution quantitative de nos fantassins devenus si rares qu’ils ne peuvent occuper le terrain et qu’ils doivent donc posséder l’ubiquité suffisante pour se trouver en juste suffisance à l’endroit où cela est nécessaire, elle est aussi dans le cadre du combat de haute intensité l’œil et le poing indispensables au combat blindé.  Nous étions novateurs dans l’emploi des voilures tournantes lors de la guerre d’Algérie, au point que l’US Army et les Marines s’en sont inspirés lors de la guerre du Viêt-Nam avec les outrances et les erreurs que l’on connaît.  L’Alat  en moins d’un demi-siècle s’est construite afin de devenir l’outil indispensable des guerres d’aujourd’hui et de celles de demain.   Il faut donc lui donner les moyens en nombre et combler le trou capacitaire de l’absence d’hélicoptères lourds  sans lesquels il serait vain de  nous engager sur des terrains de plus en plus difficiles en des scénarii de plus en plus complexes de combat et  de maintien de la paix. Il était temps de jouer le remake du retour vers le futur.

 

Roland Pietrini

Consultant expert opérationnel.

 

 

Actualisation de la loi de programmation militaire dossier:  

http://fr.calameo.com/read/000331627f6fbe2f52ad2?authid=qLQIDfQOvd97

 

Opex.360.com

http://www.opex360.com/2015/05/20/ce-que-prevoit-lactualisation-de-la-loi-de-programmation-militaire-en-matiere-dequipements/

 

Les hélicoptères de l'armée de terre : situation et perspectives

 

http://www.senat.fr/rap/r01-350/r01-35016.html

 

Autre lien:   http://www.alat2.fr/page1896.html

 

 



21/05/2015
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