ATHENA-DEFENSE

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Crise Gréco-Turque, La France à la manœuvre, une crise majeure.

 

 

 

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Sur fond de tension en méditerranée orientale, le président Macron a réagi.  Le président turc Recep Tayyip Erdogan, qui a affiché ses dernières semaines sa volonté de lancer des recherches de gaz naturel en mer, y compris dans des zones revendiquées de droit par Athènes, ne s’attendait pas à une telle fermeté de la France, misant sur la mollesse habituelle des Etats européens, oubliant que la France pouvait encore prendre des initiatives. 

 

En effet, Ankara qui avance ses pions en méditerranée orientale a trouvé récemment, fin novembre 2019, un allié de circonstance avec le gouvernement d'union nationale (GNA) libyen, ce qui lui permettait de donner du poids à ses prétentions sur de vastes zones de la région.

 

Ce mémorandum militaire turco-libyen, signé avec un gouvernement fantoche a pour but selon Ankara, de "renforcer les liens entre les deux armées" mais en réalité, permet d’étendre la zone d’influence turque et d'augmenter de 30% la superficie de son plateau continental, ce qui pourrait empêcher la Grèce de signer un accord de délimitation maritime avec l'Egypte et Chypre.

 

Chypre, l'Egypte, la France et la Grèce ont dénoncé ce texte qui "n'est pas conforme au droit de la mer" et dont "ne peut découler aucune conséquence juridique". Ils condamnent également les forages réalisés lors des derniers mois par la Turquie au large de Chypre.

 

La volonté expansionniste de la Turquie s’appuie sur un projet, celui de reconstruire un empire ottoman qui fut démantelé après la première guerre mondiale par la France et la Grande-Bretagne qui ont modelé à leur tour le Moyen- Orient de 1918 à 1923 (1).

  

Il faut se souvenir que l’empire ottoman fut durant plus de sept siècles (l’empire prend sa naissance à la fin du XIIIᵉ siècle au nord-ouest de l'Anatolie, dans la commune de Söğüt, par le chef tribal oghouze Osman Iᵉʳ) le premier État Islamique en termes d’influence géopolitique, culturelle et idéologique. La Turquie fut un pays colonisateur, l’Algérie devrait d’ailleurs s’en souvenir, elle fut occupée beaucoup plus longtemps par les Turcs que par les Français et à leur départ en 1830, sous la poussée de l’armée d’Afrique commandée par le général de Beaumont, ils laissèrent un pays en ruine. (2) À comparer avec les infrastructures que nous avons laissées en 1962, routes, écoles, hôpitaux, cultures, mines etc… Cela va sans dire, mais encore mieux en le disant.

 

En conséquence, le retour en force de l’islamisme dans la politique turque avec le recul spectaculaire de la laïcité étaye une réalité, celle d’une tentative d’imposer l’influence turque en méditerranée avec une menace pour l’Europe du sud mais pas seulement, cela vaut aussi pour l’Allemagne, la chancelière Merkel devrait en tenir compte.

 

La recherche de gaz et de pétrole n’est donc qu’un prétexte, l’objectif d’Erdogan, qui est condamné à se radicaliser (c’est le lot de tous les dictateurs), est la désintégration de l’Europe par l’attaque de toutes nos valeurs, en commençant par nos racines chrétiennes. La transformation de la basilique Sainte Sophie en mosquée n'est que le symbole de sa volonté de détruire la Turquie laïque pour en faire un état islamique.

 

Ce besoin d’Erdogan de s’affirmer et de mener en réalité une vraie guerre en méditerranée orientale est renforcée de fait par la faiblesse européenne, avec la disparition de la Grande-Bretagne sur l’échiquier international, mais aussi à cause de la politique brouillonne et hasardeuse de l'Amérique de Trump qui préfèrera sans nul doute la Turquie à la Grèce, en raison de la croyance que la Turquie serait encore un rempart face au danger russe supposé. Tout cela renforce la conviction d’Erdogan que l’heure est venue d’imposer sa nouvelle vision d’un monde islamisé.

 

Ce nouvel aveuglement de l’OTAN et des USA est une erreur stratégique majeure, car de leur point de vue, le danger en Europe c’est Poutine et non Erdogan. C’est pourquoi la France,  car les autres pays européens ne suivront pas, aurait intérêt à rééquilibrer notre géopolitique. La Russie pourrait être un allié beaucoup plus fiable que les Etats-Unis à notre égard.  L’idée gaullienne d’une Europe de l’Atlantique à l’Oural est plus d’actualité qu’on le croit. (3)

 

Il  est donc possible que Macron ait compris le danger, car céder reviendrait à donner un blanc-seing à la Turquie sur l’ensemble du pourtour de  la Méditerranée. La France n’est pas tout à fait seule, elle a su entrainer les pays européens du sud, l’Italie, l’Espagne, le Portugal, la Grèce, Chypre et Malte afin d’aider la Grèce, qui se trouve en première ligne. Les pays dits vertueux de l’Europe, l’Allemagne en premier, ne suivront pas, ils pactiseront avec le diable en pensant sauver leurs enjeux économiques et garantir leur sécurité. Ils obtiendront précisément l’inverse.

 

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La France a des atouts, en dépit de sa faiblesse relative,  elle reste la seule en Europe a pouvoir tenir tête à Erdogan, elle reste la seule puissance nucléaire indépendante,  elle possède encore une Marine et une aviation capables de supplanter la marine turque.

D’ailleurs la Turquie a compris la menace et vient de retirer son navire d’exploration gazier.

 

Il n’en reste pas moins que la Turquie est une menace. Elle marque sa présence en Libye, au Levant, en Afrique avec son activisme islamiste, ce qui augure d’un rapprochement possible avec certains états du Maghreb.

 

La vente expresse de 18 Rafale et de 10 d'occasion (4) avec les missiles et la formation des pilotes est un signe fort, la signature à venir d’un accord de défense renforcé avec la Grèce le sera tout autant. D’ailleurs,  les attaques ad hominem du dictateur Erdogan envers Macron est un signe ; il reconnait ainsi que la France est la seule à avoir la volonté et les moyens de s’opposer à sa politique et aussi extrémiste qu’il soit, il a compris que cela allait être moins facile qu’il le pensait.  

 

Pour une fois donc, j’approuve sans réserve la position du président Macron sur ce sujet précis. Aura-t-il la possibilité et la volonté de tenir alors « qu’en même temps » il sera paralysé par le péché originel, la perte de notre souveraineté ?

Sans cette souveraineté rien n’est possible.

 

Nous sommes sans nul doute dans une phase critique, nous jouons notre survie institutionnelle culturelle et économique, face aux montées des intégrismes à l’extérieur comme à l’intérieur de notre Nation. Il est temps de revenir à des formules simples au risque de plagier le président américain Woodrow Wilson lors de sa campagne pour sa réélection en 1916, qui prononça la première fois le slogan « America first ». Cela s’appelle le patriotisme qui n’est en fait que le dévouement d'un individu envers le pays qu'il reconnaît comme étant son bien commun qu’il convient de défendre.

 

Elle appartient à ceux qui, Français récents ou pas, se reconnaissent dans nos valeurs communes, dont les racines sont chrétiennes et la réalité est laïque ?

Lorsqu’on n’aime pas la France on la quitte, c’est une idée simpliste, mais elle a le mérite d’être facile à comprendre.   Ces valeurs méritent d’être défendues ce que font légitiment la quasi-majorité des citoyens de tous les pays au monde. Les Français de l’étranger le savent, ils respectent les us et coutumes des pays qui les accueillent, la réciproque devrait aller de soi.

 

C’est pourquoi la nationalité française doit se mériter et non pas se donner par le seul  effet du droit du sol.

 

C’est pourquoi la dictature des minorités et leur fascisme de fait doivent cesser, nous devons revenir à une forme de populisme éclairé, ce qui n’est pas un gros mot. C’est la majorité de l’opinion qui doit dicter sa loi et non l’inverse.

 

C’est pourquoi la démocratie doit se réformer pour donner la parole au peuple car si les révolutions appartiennent au peuple, elles ne peuvent se structurer sans les élites or ces idéologues nous ont trahis et emmenés au point où nous en sommes.

 

C’est pourquoi la Justice doit en premier défendre les victimes et non les délinquants.

C’est pourquoi aussi, notre défense doit être entièrement repensée en lui donnant de la consistance et du muscle. Sans quoi nous cèderons un jour devant les exigences et les pressions de nos adversaires.  J’ai développé de nombreux articles sur les carences de notre défense. (5)

 

Sur tous les fronts nous devons cesser de faire semblant de faire, le temps n’est plus au discours, l’autorité doit être restaurée avant que celle-ci ne se transforme en tentation de totalitarisme.  Cela commence par l’affirmation de notre volonté sur le plan international mais elle ne pourra s’exprimer qu’après avoir réglé nos problèmes intérieurs pour recouvrer rapidement notre souveraineté, toute notre souveraineté.

 

Roland Pietrini

 

 

(1)  Point d’histoire : Le Monde En Turquie, les séquelles de cette guerre sont fortes »

Les péripéties du conflit et la révolution kémaliste qui le suit sont interprétées aujourd’hui à Ankara comme la naissance et le salut de la « nation turque ».Propos recueillis par Gaïdz Minassian

 

(2)  Jusqu'en 1830, la régence d'Alger était vassale de l'Empire ottoman. ... Pendant la domination ottomane en l'Algérie, des Turcs, principalement d'Anatolie, se sont installés dans la régence d'Alger. Parmi les populations issues de ces mélanges, on compte les kouloughlis, du turc kul oğlu signifiant « fils de serviteur » En 1830, il y avait 15 000 soldats turcs en Algérie.

 

(3) Comment la Grèce relance la France Le mammouth

 

(4)  la formule est tirée du discours prononcé à Strasbourg en novembre 1959 : « Oui, c’est l’Europe, depuis l’Atlantique jusqu’à l’Oural, c’est l’Europe, c’est toute l’Europe, qui décidera du destin du monde !

 

(5) 

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16/09/2020
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